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Grimpeurs prolétaires contre aristocrates des sommets

Comment l’escalade est devenue un sport
le 20 août 2014, par Tarabis ⎣CPAL⎤

par Jean-Paul Walch, Le Monde Diplomatique, août 2014

Piolet à la main, un alpiniste chemine sur une crête étroite qui mène à un sommet enneigé. De part et d’autre, une pente glacée plonge vers l’abîme. « Les dirigeants extraordinaires ne se contentent pas de diriger », proclame le slogan. Nous ne sommes pas dans les Alpes ou dans l’Himalaya, mais dans l’hebdomadaire britannique The Economist : la société IE fait la promotion de son diplôme « Leadership positif et stratégie ».

L’imaginaire collectif associe volontiers ascension et dépassement de soi, grandes épopées alpines et héroïsme. Sans doute parce que les alpinistes ont longtemps cherché à donner cette image d’eux-mêmes : « Seul celui qui pratique le grand alpinisme peut en connaître et la grandeur et la rigueur », écrivait en 1973 René Desmaison. Ce guide de légende ne concevait pas sa passion comme un simple sport, mais comme un « idéal dont la vie était l’enjeu ». D’où, peut-être, la propension du monde de l’entreprise à s’emparer de l’image de ces héros aux yeux rivés sur les sommets.

Dès 1948, pourtant, certains contestent cette vision des choses. La revue Tourisme et travail, proche de la Confédération générale du travail (CGT), dénonce l’élitisme d’une pratique qui « crève de l’individualisme forcené de la plupart de ses pratiquants. Ils vous disent “pureté des cimes”, “solitude”, “loin d’en bas”, “là-haut, seul dans la lumière”, ou bien encore : “plus près de Dieu”. Mais au fond, ils veulent rester entre eux ». Dans Alpinisme et compétition, qu’il publie l’année suivante, le « bleausard » (grimpeur qui s’entraîne dans la forêt de Fontainebleau) Pierre Allain défend l’escalade comme discipline autonome : « Ce n’est pas uniquement en vue de courses en montagne que nous allons à Bleau et que nous y grimpons, c’est même surtout parce que nous en faisons un jeu qui nous passionne en lui-même. »

La Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT) — proche du Parti communiste — crée en 1953 une « spécialité montagne » pour « rabaisser l’alpinisme au rang d’un sport comme les autres » et, ce ()

Extrait d’un article de Jean-Paul Walch, paru dans le Monde Diplomatique N° 725 - 61e année. Août 2014 : http://www.monde-diplomatique.fr/2014/08/WALCH/50699

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